Ils ont presque tout dit.
Monsieur le Président de la République.
Mesdames et Messieurs les membres du gouvernement, Mesdames et Messieurs les parlementaires, Madame la Présidente du département, Mesdames, Messieurs les élus, Mesdames, Messieurs.
Monsieur le Président de la République.
Le lieu que vous avez choisi pour vous adresser aujourd’hui, aux Marseillaises et aux Marseillais, est un symbole puissant.
Bâti comme demeure impériale par Napoléon III, ce palais à peine terminé fut envahi par le peuple de Marseille qui détruisit les insignes impériaux lors de la proclamation de la République en 1870.
Ce lieu, son histoire, disent, ce qui nous unit notre attachement profond, à la République.
Monsieur le Président, votre visite à Marseille est historique. Et je voulais, au nom de l’ensemble du conseil municipal, au nom des Marseillaises et des Marseillais, vous réserver le meilleur accueil possible. Je voulais vous dire en toute sincérité, au-delà des formes protocolaires de la tradition républicaine, combien nous sommes sensibles à votre présence, qui est la preuve, s’il en fallait une, de votre attachement profond pour la ville de Marseille.
Ici, depuis les jardins du Pharo, nous pouvons contempler le palimpseste d’une ville multimillénaire.
Marseille renoue progressivement avec son histoire, celle d’une ville majeure regardant vers la mer et vers son littoral.
Cette histoire, c’est celle de la rencontre entre une celto-ligure des quartiers nord de la ville et un Navigateur phocéen venu d’Asie mineure.
Cette histoire, irrigue notre imaginaire et les horizons d’une ville qui s’est construite en balcon sur la mer.
Depuis, au fil des siècles, notre ville a développé ses particularités, sa singularité souvent opposé au centralisme mais toujours profondément républicaine.
Marseille, c’est aussi une identité puissante et diverse qui s’est enrichie par la sédimentation de strates successives de population venue ici, au gré des fracas de l’histoire.
Fuyant la misère, ou la guerre, des hommes, des femmes, des enfants ont parcouru les chemins de l’exil pour s’arrêter ici par nécessité, quelquefois par choix.
En cela Monsieur le Président, Marseille, est à l’image de la France, quelles que soient nos origines, nos histoires ou la couleur de notre peau, on peut devenir marseillais à partir du moment où on le décide.
C’est l’histoire de cette ville, comme c’est le sens du projet républicain.
Marseille est cette ville incroyable.
Ou que l’on soit capitaine d’industrie où instituteur, médecin ou galérien, on peut se forger un destin et réussir sa vie.
Marseille, c’est la ville des possibles.
Celle ou les déflagrations de l’histoire donne la force de vivre, de créer, d’inventer, de construire et de bâtir.
Marseille, Ce n’est pas seulement l’une des plus belles villes de France, c’est aussi une ville fraternelle.
Nous avons fait une force de cette fraternité et nous tenons entre nos mains cette incroyable idée qu’on peut vivre ensemble.
Cette question de l’appartenance au pays, et l’identité de la 2e ville de France pourrait par facilité, être caricaturée comme un folklore, comme un particularisme local.
Ce regard serait bien pratique pour masquer une réalité historique d’abandon, d’injustice et de gâchis.
Aujourd’hui, il nous faut regarder par-delà les poncifs pour Marseille et pour le pays.
Monsieur le Président.
La méfiance réciproque entre Marseille et Paris, vous et moi, en héritons.
Mais nous n’en sommes pas les héritiers.
Marseille a entamé sa transformation pour enfin pouvoir concrétiser des projets, mais nous avons aussi besoin que vous réformiez les aberrations d’une gouvernance territoriale illisible et injuste.
Monsieur le Président.
Nous nous tenons aujourd’hui devant un palais impérial dans les années 1850, la France a construit à Marseille : la rénovation de l’Hôtel Dieu, le palais de la bourse ou encore la cathédrale de la Major.
Ce dont nous avons besoin aujourd’hui est peut-être moins grandiloquent, mais ce sera tout aussi grandiose.
Et tout aussi durable en août 1792, lors de l’insurrection des Tuileries, les fédérés marseillais entonnaient un chant qui, de bouche à oreille, est devenu en 1795 la Marseillaise, notre hymne national.
Marseille et les Marseillais font partie de l’histoire de France. Ils ont participé à la construire, à se battre pour elle.
Monsieur le Président, je sais que Marseille a encore beaucoup pas donné.
Oui, nous pensons que l’État doit faire à nouveau confiance à Marseille et parier sur cette ville incroyable, pas pour moi, pas pour cette majorité, mais pour ceux que nous avons collectivement promis de servir pour les marseillais et à commencer par les enfants, par les petits.
Aujourd’hui, Marseille est touchée en son cœur par les trafics d’armes, les assassinats, les quartiers abandonnés. Ces quartiers qui se referment dans la peur, dans l’économie informelle, une économie aux connexions internationales. Cette situation n’est pas nouvelle, disent certains peut-être. Mais il n’y a pas de fatalité, pas plus qu’il n’existe de solutions miracle ou instantanée. Nous n’aurons pas fini le travail aujourd’hui, loin de là. Mais il faut répondre à l’urgence et il s’agit d’abord de recoudre une ville fracturée devenue duale, inégalitaire, de remettre de la justice et du service public par une approche globale et systémique des mots qui gangrène notre ville, de lutter contre les injustices économiques, culturelles, éducatives, sécuritaires, sportives, sanitaires, sociales et spatiales d’une ville qui a trop longtemps oublié une partie de ses enfants.
Cette ville qu’il nous faut désormais recoudre, rassembler pour la retrouver et pour la développer, ça passe par la rénovation urbaine, par les transports dans une ville embouteillée ou le dernier projet de métro fut inauguré à une époque où ni vous ni moi n’étions encore nés, Monsieur le Président.
Une ville qui assigne à résidence faute de mobilité et qui finit par se scléroser elle-même.
Ce projet d’une ville juste, et d’une ville tournée vers l’avenir, il passe d’abord par l’école.
Ils viennent de le dire, ils viennent de nous le raconter, ce n’est pas l’actualité qui nous a fait prendre conscience des choses. C’est un sujet que nous portons depuis toujours.
Lorsque je suis venu vous voir à l’Élysée, nous avons eu un dialogue sincère, un dialogue direct. Je vous ai donné mon sentiment sur la ville, son histoire, son état et en particulier celui de nos écoles et de la honte que celui-ci représentait pour la République.
L’école, c’est une promesse, c’est une promesse émancipatrice qui ouvre un horizon pour vous, pour nos enfants, c’est là qu’on apprend à grandir, à faire société, c’est là qu’on devient une femme, un homme debout. C’est là qu’on se découvre et qu’on peut se choisir un avenir, le vôtre. L’école, c’est aussi un repère. Et on l’a vu et on l’a vu aujourd’hui et on l’a vu hier. C’est un repère qui structure la vie des enfants, des familles du quartier. Ça doit être une chance pour les 80 000 petites marseillaises et petits marseillais qui chaque année, en école maternelle ou élémentaire mettent leur confiance dans le système éducatif public.
Mais à Marseille, nos écoles sont sinistrées. Au printemps dernier, nous avons pris un engagement fort pour vous. Faire des écoles, Une priorité, recoudre la ville, miser sur la jeunesse, lutter contre les inégalités. Elle est là aussi la solution pour relever Marseille.
Cet espoir nous inspire.
Il nous faut voir loin.
Et nous cherchons à réaliser.
Ce que certains pensaient impossible.
Monsieur le Président de la République.
Vous portez sur notre ville un regard attentif et ambitieux. Nous faisons le choix d’écrire une nouvelle page de l’histoire de Marseille, Main dans la main, l’Etat et la ville, en dehors de tout clivage politique, au-delà de nos différences, de nos histoires, de nos choix, nous sommes portés par l’intérêt général. Nous ne vous attendions pas dans l’idée de recevoir un chèque mais dans l’espoir de partager une vision, un agenda, de porter ensemble un engagement.
Je le dis à nouveau, Marseille est un avenir pour notre pays, cette ville bouillonne.
Les potentiels ne demandent qu’à s’exprimer si l’impulsion politique est au rendez-vous et c’est notre ambition la France.
Pour raconter sur sa grande capitale du Sud, Marseille a besoin de l’État, pas pour demander l’aumône, mais parce que, au contraire, nous avons l’incroyable audace de penser Monsieur le Président, que Marseille est une chance formidable pour la France, par sa situation géographique exceptionnelle, par sa jeunesse, son instinct de survie, son esprit de débrouille, par le dynamisme de sa société civile, par son identité singulière, populaire et pionnière, Marseille peut redevenir un moteur, un phare, une terre promise.
Marseille n’est pas une extrémité.
C’est une porte, un carrefour, un eldorado.
Marseille peut devenir le premier port sur la Méditerranée, le plus grand hub européen de connexion adossé à la plus grande université francophone du monde.
Un pôle d’énergie, de liberté, de développement économique, culturel et intellectuel vers la Méditerranée, le Maghreb, l’Afrique et l’Asie.
Pour conclure, puisqu’on m’y invite, mais quand on habite à Strasbourg, à Nice ou à Clermont-Ferrand, je suis sûr qu’on a intérêt à ce que la 2e ville du pays retrouve la place qu’elle n’aurait jamais dû perdre, celle d’une grande capitale euro-méditerranéenne.
Comme Barcelone en Espagne, comme New York aux États Unis comme Shanghai, Milan ou Saint-Pétersbourg, il est des villes, loin des capitales, qui portent une part de l’identité, de l’histoire et du dynamisme de leur pays. Cette ville accueille aujourd’hui, son Président et nous savons que vos annonces seront déterminantes au nom des marseillaises et des marseillais, je tiens simplement à vous remercier d’avoir répondu présent à notre appel. La France peut compter sur sa grande capitale du Sud.
Vive la République, vive Marseille et vive la France.