Aux parlementaires : vous pouvez éviter de nouveaux drames du logement indigne !
Premiers signataires (version originale parue dans Libération le 8 février 2024) :
Liliana Lalonde, mère de Julien Lalonde, victime de l’effondrement de la rue d’Aubagne ; Jean-Baptiste Eyrauld, porte-parole de la fédération DAL ; Kevin Vacher, membre du Collectif du 5 novembre – Noailles en colère ; Antonin Sopena, Ludivine Feral et Aurélien Leroux, avocats, Syndicat des Avocats de France ; Chantal Bourglan, avocate honoraire ; Fathi Bouaroua, co-président de l’Association Méditerranéenne pour l’Insertion par le Logement (AMPIL) ; Alizée Coustets-Girardot, médiatrice sociale ; Sharon Tulloch, délogée pendant 1523 jours, autrice de “Un Voyage accidentel” ; Alieu Jalloh, association des usagers de la PADA ; Bernard Eynaud, co-président de la LDH Marseille ; Karima Berriche, Syndicat des Quartiers Populaires de Marseille ; Jérôme Mazas, paysagiste, mouvement citoyen “Nos Vies, Nos Voix” ; Haouache Djamila, Présidente de l’association de défense de locataires et membre du collectif d’Air-Bel, Conseil Citoyen 11/12 ; Charles Réveillère et Camille François, sociologues, membres du collectif d’Air-Bel ; Emmanuel Patris et Alima El Bajnouni, co-président·es d’Un Centre-Ville Pour Tous, Badra Delhoum, militante du SNAS CGT, Kader Attia, citoyen et militant associatif de l’insertion par le logement FUIQP Marseille, Association Droits et Habitats Marseille.
177 | Anonyme | Mar 20, 2024 | ||
176 | victoria f. | Mar 18, 2024 | ||
175 | Anonyme | Mar 18, 2024 | ||
174 | Anonyme | Mar 06, 2024 | ||
173 | Thomas D. | Mar 06, 2024 | ||
172 | Anonyme | Mar 04, 2024 | ||
171 | Anonyme | Mar 04, 2024 | ||
170 | Rosalie E. | Mar 02, 2024 | ||
169 | Clotilde H. | Mar 01, 2024 | ||
168 | Laureline C. | Fév 29, 2024 | ||
167 | FRANCOISE D. | Fév 29, 2024 | ||
166 | Michel T. | Fév 29, 2024 | ||
165 | Laure m. | Fév 28, 2024 | ||
164 | Anonyme | Fév 28, 2024 | ||
163 | Molly F. | Fév 28, 2024 | ||
162 | Anonyme | Fév 28, 2024 | ||
161 | Pèire B. | Fév 28, 2024 | ||
160 | Geneviève P. | Fév 28, 2024 | ||
159 | Manon J. | Fév 28, 2024 | ||
158 | Manon G. | Fév 28, 2024 | ||
157 | claudine l. | Fév 28, 2024 | ||
156 | Jocelyne M. | Fév 28, 2024 | ||
155 | sigrid c. | Fév 28, 2024 | ||
154 | Mael C. | Fév 28, 2024 | ||
153 | Christelle C. | Fév 28, 2024 | ||
152 | Sebastien M. | Fév 28, 2024 | ||
151 | ANDRÉ F. | Fév 27, 2024 | ||
150 | Emilie F. | Fév 27, 2024 | ||
149 | Anonyme | Fév 27, 2024 | ||
148 | Nina R. | Fév 27, 2024 | ||
147 | Brigitte R. | Fév 27, 2024 | ||
146 | Zania D. | Fév 27, 2024 | ||
145 | Ana Liza A. | Fév 27, 2024 | ||
144 | Agnes G. | Fév 27, 2024 | ||
143 | Anonyme | Fév 27, 2024 | ||
142 | Cécile K. | Fév 27, 2024 | ||
141 | Achraf M. | Fév 27, 2024 | ||
140 | Sara P. | Fév 27, 2024 | ||
139 | Nadine U. | Fév 27, 2024 | ||
138 | Véronique D. | Fév 27, 2024 | ||
137 | Anonyme | Fév 27, 2024 | ||
136 | Saïda B. | Fév 27, 2024 | ||
135 | Anonyme | Fév 27, 2024 | ||
134 | Yacine H. | Fév 27, 2024 | ||
133 | Anonyme | Fév 27, 2024 | ||
132 | Victor B. | Fév 27, 2024 | ||
131 | Aurélien L. | Fév 27, 2024 | ||
130 | Fabienne L. | Fév 27, 2024 | ||
129 | Charles D. | Fév 27, 2024 | ||
128 | Marie S. | Fév 27, 2024 | ||
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Fin janvier, Marseille a été à nouveau endeuillée d’un drame de l’habitat indigne. Un enfant est décédé lors d’un incendie dans l’une des grandes copropriétés dégradées les plus connues de la ville [1].
Marseillais et marseillaises, nous avons vu défiler ces catastrophes du mal-logement ces dernières années dans notre ville : de l’effondrement meurtrier de la rue d’Aubagne aux multiples incendies dans des grands ensembles (aux Lauriers, à Félix Pyat, aux Flamants…) en passant par le décès d’une personne de la légionellose à la cité d’Air-Bel.
Sénateurs et sénatrices, vous allez examiner un projet de loi portant sur « l’habitat dégradé » dans les jours qui viennent. Puis, les représentant·es de l’ensemble des parlementaires auront à finaliser ce texte. Passé en procédure accélérée par le gouvernement, en l’absence de Ministre du logement et sans réelle consultation de la société civile, celui-ci manque finalement de réelle ambition au regard des enjeux de protection des occupant·es et de lutte contre les propriétaires indignes que nous observons sur le terrain, et ce malgré quelques avancées techniques qui sont globalement saluées. A Lille [2], Grigny [3], Vaulx-en-Velin [4], Toulouse [5], Bordeaux [6] ou ailleurs, certain·es d’entre vous font face aux mêmes difficultés conduisant aux mêmes catastrophes. Nous voudrions vous exposer comment, à Marseille, le bilan de nos actions citoyennes peut contribuer à donner une réelle ambition à vos futurs débats et vous transmettre nos 20 propositions prioritaires à ce sujet : bit.ly/20propositionsLHI .
Protéger les occupants
« On a frappé à la porte très lourdement
[…]
Ton pouls grimpe très vite tu perds tout repère
Donc tu respires longuement durement
Encore et encore »
Ces mots sont ceux de Sharon Tulloch [7], délogée pendant 1523 jours de son logement. Ils décrivent ce que vivent chaque année des milliers de mal-logés évacués en urgence. Ce sont plus de 8000 micro-drames de ce genre que notre ville a connu depuis cinq ans.
Une loi à la hauteur des enjeux devrait donc intégrer ce qui a été obtenu par nos combats citoyens à Marseille : en premier lieu l’obligation d’accompagnement social, juridique, vers un « logement adapté » aux besoins des habitant·es. A ce titre, nous sommes très inquiets de la disposition prévue à l’article 7 du projet de loi (PJL) actuel, prévoyant au contraire de faciliter l’installation d’ALGECOs rendue possible jusqu’à cinq années, sans limiter ce recours au profit d’une véritable stratégie de relogement digne.
Il est également nécessaire de protéger les occupants en amont des procédures, en étendant par exemple le « contrôle technique » au niveau du logement dans le parc privé et social. Cela facilitera la tâche de tout le monde : syndics, propriétaires, collectivités, habitants, en anticipant la dégradation des bâtiments avant qu’il ne soit trop tard, dans le parc privé et social.
Cette protection doit s’étendre aux petits propriétaires. Vous connaissez comme nous leurs situations, dans un contexte de crise économique qui les touche durement. Ils et elles demandent à ce que les professions de l’immobilier soient mieux contrôlées, là où le PJL actuel ne les obligent qu’à signaler les délits d’autrui. La prise en charge de leur relogement doit également être financée et organisée comme un acte de solidarité, lorsque leurs revenus sont insuffisants, comme cela est désormais mis en place grâce à la charte du relogement marseillaise.
Lutter contre tous les bailleurs indignes
Ces mesures de protection éviteront la répétition de la crise humanitaire que nous avons connue, mais elles permettront également d’assumer réellement l’une des ambitions premières qui nous lie toutes et tous : la lutte contre les marchands de sommeil. Nous vous encourageons à répondre positivement à la demande de nombreuses associations et de personnalités politiques, dont le maire de Marseille récemment [8], d’une redéfinition du délit de location d’un bien indigne à la hauteur des besoins juridiques en la matière.
Au-delà des marchands de sommeil, nous butons également sur la mauvaise foi de certains propriétaires qui refusent d’exécuter les travaux prescrits. A Marseille, cinq ans après le drame de la rue d’Aubagne, la seconde municipalité de France peine encore à disposer des moyens suffisants pour cela. La création d’une agence nationale des travaux d’office pourrait répondre aux besoins des mairies en la matière. Il faut également doter les maires et la justice de moyens suffisants pour briser au plus tôt le cercle vicieux pouvant conduire à la dégradation de tout un bâtiment : pouvoir d’astreinte pour les premiers, possibilité de séquestre des loyers pour les seconds.
Enfin, nous voudrions ensemble nous pencher réellement sur la dégradation du parc social, injustement écarté de l’actuel PJL. Dans beaucoup de nos cités, nous constatons que certains pouvoirs publics ont longtemps fermé les yeux sur ces situations. Ce fût le cas dans la cité d’Air-Bel où l’absence de gestion des équipements collectifs d’eau chaude a conduit à des cas de légionellose, ou chez nos voisins de Martigues où plus de 150 personnes ont été récemment évacuées face à un risque d’effondrement [9].
Plutôt qu’en arriver à des procès et à des situations sanitaires parfois gravissimes, les bailleurs sociaux doivent être contrôlés et accompagnés vers de meilleures pratiques, en étendant par exemple la suspension des allocations logement (possible dans le privé) au parc social, en cas de non-respect des normes de décence.
Repartir des expériences locales
Ces propositions et bien d’autres sont le fruit de l’expérience des avocats, associations, collectifs, mal-logés marseillais depuis de longues années. Certaines sont expérimentées dans le cadre de la charte du relogement produite et négociée par notre société civile et les personnes concernées, d’autres sont issues d’une proposition de loi « rue d’Aubagne » [10] rédigée par des citoyens et citoyennes, enfin certaines sont les conclusions que des mobilisations récentes dans les cités HLM nous ont permis de tirer.
Nous avons vécu à Marseille cinq longues années d’une crise des périls qui ne s’arrête plus. Nous mettons aujourd’hui notre expérience au service des deux millions de personnes directement concernées en France. A l’heure où la crise climatique va accentuer la dégradation de bâtis déjà abîmés par le laisser-faire, dans les territoires urbains comme ruraux, où la crise économique va mettre en difficulté locataires et petits propriétaires, nous ne pouvons qu’être pessimistes sur l’explosion de ce problème et vous proposons de travailler ensemble à nous y affronter, enfin.
[7] Sharon Tulloch, Un Voyage accidentel, éditions Commune, 2024.