Michel Couartou | le 24/09/2018 | publié sur le site du Moniteur : https://www.lemoniteur.fr/article/a-marseille-la-societe-civile-propose-un-projet-alternatif-au-ppp-ecoles.1993604
Architectes, économistes, artisans… réclament un rendez-vous au maire pour lui demander d’abandonner la procédure de PPP pour la rénovation de 32 écoles « Pailleron ». Ils proposent un contre-projet étayé qui permettrait, selon eux, d’économiser plus de 300 millions d’euros et de soutenir le tissu local d’artisans.
Le collectif « Marseille contre les PPP », qui rassemble le syndicat des architectes des Bouches-du-Rhône (SA 13), l’Unsa, la MAV Paca, le Cinov, la Capeb 13, le syndicat national du second œuvre (SNSO), de nombreux syndicats d’enseignants (FSU, Sud Education, SNU, etc.), de parents d’élèves, et des citoyens, vient de présenter un projet alternatif au partenariat public-privé (PPP) que la Ville de Marseille a lancé pour la rénovation de ses 32 écoles dites « Pailleron » et la construction de six nouvelles écoles.
En octobre 2017, le Conseil municipal avait voté une délibération actant le principe du recours au PPP pour un montant global estimé à 1,04 milliard d’euros. Depuis, trois recours ont été déposés contre cette délibération : en décembre 2017 par plusieurs citoyens, d’une part, et par le Conseil régional de l’Ordre des architectes, d’autre part, et le dernier en avril 2018 par le SA 13.
Architectes et économistes de la construction, bâtisseurs du projet alternatif
Ce projet alternatif a été élaboré par les architectes du Syndicat, épaulés par des économistes de la construction et des spécialistes de la maintenance des écoles. Ils comptent le soumettre au plus tôt à Jean-Claude Gaudin. Une demande officielle d’audience lui a été transmise.
« Ce projet montre qu’on peut réaliser les mêmes travaux pour un moindre coût, avec des entreprises locales et en totale concertation avec les usagers, enseignants et parents d’élèves. Tout ce que ne fait pas le PPP. », explique Maxime Repaux, conseiller du Syndicat. Le contre-projet pointe tout d’abord l’absence de diagnostic préalable et d’audit de l’ensemble du parc des écoles de Marseille.
Sur le plan technique, le SA 13 remet en cause le choix du PPP de démolition-reconstruction des écoles « Pailleron ». En prenant l’hypothèse d’une maîtrise d’ouvrage directe de la ville, il estime qu’une réhabilitation lourde, en gardant la structure, pourrait suffire dans de nombreux cas, et réduire ainsi la facture globale. Une simulation financière sur ces bases estime le coût de rénovation à 723 millions pour les 32 groupes scolaires, une économie de près de 300 millions d’euros.
Retour à la maîtrise d’ouvrage publique
Sur le fond, Christian Bruschi, avocat honoraire et membre du collectif, met le doigt sur la « valorisation du foncier » de certaines écoles, « des projets immobiliers laissés à la totale discrétion du partenaire privé, dans le flou le plus total ». Il s’étonne également d’une avance sur rémunération, versée à la livraison des premiers chantiers, qui atteindrait 70 % du coût total du PPP, alors que les textes de référence des marchés de partenariat fixent cette avance entre 15 et 30 % du montant.
Quant à Patricia Blanchet-Bhang, présidente de la Capeb 13, elle refuse l’argument de la sous-traitance que le titulaire du PPP pourrait confier aux artisans locaux. « C’est nous obliger à travailler dans des conditions de dépendance totale, sans maîtrise des prix ni des délais. Pourquoi cela alors que les entreprises locales sont tout à fait compétentes pour gérer ce genre de chantier en direct avec le maître d’ouvrage public ? » Une opinion que partage Patrick Verbauwen, président du SA 13, pour qui « le choix du PPP revient tout simplement à faire sortir tout un pan des acteurs locaux du système de production de la construction. »
Tous militent pour un abandon du PPP et un retour à la maîtrise d’ouvrage publique directe. « Nous dire que les services de la ville ne sont pas compétents pour gérer ce type de chantiers n’est pas un argument recevable. C’est finalement très méprisant pour son propre personnel », conclut Christian Bruschi.